de Jean-Marc Vallée
2005, Canada
Avec Michel Cote, Marc-André Grondin, Danielle Proulx
Sorti le 3 mai, durée 2h09min.
Le point de départ de CRAZY fait penser à une sitcom américaine. Une famille nombreuse, père un peu dépassé et mère débordante d’amour, avec comme descendance des garçons aux caractères définis d’un trait : l’intello, le sportif, le rebelle grande gueule ou encore « l’ennemi » suivant le héros, Zachary, quatrième larron en quête d’identité, et enfin Bouboule, dernier arrivé. De cette longue liste découlent deux des reproches que l’on pourra faire à ce film : mis à part le héros, les personnages sont un peu convenus, n’évolueront pas vraiment de leurs cases, et certains sont un peu délaissés. Cela n’empêche qu’ils sont bien dessinés (notamment le père, qui entonne Aznavour dès qu’il le peut), et que le fonctionnement de cette cellule familiale hors norme est savoureux (au-delà du plaisir immédiat d’entendre du québécois).
Le choix de l’époque traversée n’y est pas pour rien : Zachary est né le 25 décembre 1960, et le film le suit jusqu’à ses vingt ans et quelques, l’accompagnant dans sa recherche d’identité. Dans une famille où tous les extrêmes sont occupés, il va osciller, entre Pink Floyd, Bowie, le punk, le baroudeur, un peu tout en fait, entre les bornes que constituent les autres membres de sa famille. Les dialogues font souvent mouche, les retournements de situations aussi, tant comiques que plus intimes. Car Jean-Marc Vallée n’oublie pas d’explorer aussi ces moments secrets, comme celui où le père fait face à ses limites en tant qu’homme, incapable d’accepter que Zachary puisse être homosexuel. Car ce dernier, campé par un excellent Marc-André Grodin, sous ses dehors un peu excentriques, est somme toute normal suivant les critères paternels, et sous cette normalité, se demande s’il n’est pas ‘fif’ (pour ‘fifille’, traduit dans les sous-titres - car il y a des sous-titres à certains moments - par ‘tapette’). En parallèle, les scènes entre Zachary et sa mère fournissent des petits havres d’amour paisibles, où le réalisateur se permet de glisser quelques questions sur la foi. De tous ces différents fils, Jean-Marc Vallée arrive à tisser une chronique réussie, même si elle n’est pas très originale, défaut compensé en partie par une b.o. aux petits oignons.
Le cinéma canadien et plus spécifiquement québécois est rare sur nos écrans. Seuls deux films se sont fait remarquer (et à juste titre), Le déclin de l’empire américain et sa suite, les Invasions barbares, du réalisateur Denys Arcand. Il a également dirigé l’excellent Jésus de Montréal, qu’on a pu voir sur nos télévisions en France.